Friday, March 30, 2007

Kely et Samba

Que serait la maison que nous habitons dans le quartier de Soavimbahoaka sans Kely la chienne et Samba le chat? Sûrement un havre de paix. Kely est une chienne de race non déterminée, sorte de croisement entre un lévrier et un lémurien, d’où sa grande taille, sa maigre silhouette, sa carcasse aérodynamique et son air con. Son nom vient du malgache « kely » qui signifie “petit”, et lui fut donné par Ann, l’épouse de Colby (voir interview dans ces pages).

L’emploi du temps quotidien de Kely se découpe de la manière suivante: aboyer sans raisons dans le jardin, sentir le cul de la tortue, observer un pan de mur pendant des heures avec les oreilles en arrière, gober des mouches, des moustiques et des libellules les jours de fête, et enfin se niaquer l’entre-pattes sur le canapé du salon, dans une posture on ne peut plus ridicule. Mais s’il est une activité que Kely prise par-dessus tout, son “pêcher mignon” (comme diraient les Anglais) voir sa “raison d’être” (comme diraient les Américains), c’est de harceler Samba. Samba est un chat gris, de race indéterminée lui aussi, très maigre lui aussi et, comme tout bon chat qui se respecte, il a lui aussi un air très con figé sur sa gueule de chat. Son nom vient du portugais « samba » qui signifie bossa nova. Son planning est indéterminé car il est très souvent en déplacement, mais lorsqu’il séjourne à la maison, Samba apprécie de manger des croquettes en faisant du bruit, réclamer plus de croquettes même si son auge déborde déjà, parce qu’il aime bien quand on lui verse les croquettes, et surtout miauler sans raisons, ce d’une façon insupportable et de préférence à trois heures du mat.

Chaque soir, quand nous rentrons du bureau, le rituel est le même. Très procédurière, Kely aime nous faire la fête en bonne et due forme, et l’accueil qu’elle nous réserve est une cérémonie millimétrée.

En descendant de la voiture, on peut déjà apercevoir deux naseaux dépassant sous le portail souffler un épais nuage de poussière. La truffe disparaît brutalement en heurtant le portail, et l’on entend un gémissement qui rappelle celui de Chewbaka dans Star Wars. Ensuite, alors que l’on pénètre dans le jardin, elle bondit sur l’un de nous et nous donne un coup de boule sur la main. Ses origines lévrières prennent soudainement le dessus sur son lémurienisme, et elle disparaît pour faire trois fois le tour de la maison à la vitesse de la lumière. A peine le temps pour nous de glisser la clé dans la serrure qu’elle vient se fracasser de plein fouet sur la porte d’entrée. La porte s’ouvre, et elle nous coupe le chemin pour réintégrer au plus vite son poste d’observation du bas du mur du salon, les oreilles en arrière comme il se doit.
Un miaulement retentit soudain dans la nuit. Les oreilles de Kely se dressent, sa gueule inexpressive s’anime d’un air indigné et elle disparaît dans le jardin. Elle réapparaît quelques secondes plus tard avec la tête de Samba dans sa gueule. Elle secoue le pauvre chat dans tous les sens tel un vieux jouet en caoutchouc. Cela dure quelques minutes, puis les deux marquent une pause, durant laquelle Kely tient le malheureux Samba, hébété, en respect, et les deux regardent dans le vide dans des directions opposées, et ce de leurs airs respectifs les plus cons.
Kely et Samba. Un début de soirée classique à Soavimbahoaka…

BeN © 2007

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